Vintage: Delta P12 (1987),
première partie.

Edité le 08/10/2007.
Réactualisé le 27/11/2007.
Textes et photos de Georges.

L'auto présentée ici vient d'Espagne (un grand merci au passage à Jordi M. pour cette rareté!). Sa restauration sera narrée étape par étape, car, comme toute auto de compétition qui se respecte, celle-ci a beaucoup roulé. Une première inspection ne montre rien d'alarmant. Tout semble présent, pas de casse apparente, l'usure semble normale. Avec un peu d'huile de coude et de patience, on devrait pouvoir lui redonner sans trop de peine une seconde fraîcheur.

Première étape, identifier le modèle. Une chose est certaine, il s'agit indéniablement d'une Delta (ou plus exactement une Delta Systems), marque mythique aujourd'hui disparue. Delta était une grande marque américaine des années 80 et qui a connu son succès en compétition. Elle a par exemple été championne du monde en catégorie piste 1/8° thermique avec le pilote Arturo Carbonnel en 1981. Ce même pilote a été sacré champion du monde piste 1/12° électrique Modified (car il existait à cette époque deux classes, Stock et Modified) en 1982 (sur le prototype de la future Super Phaser semble-t'il).

Le nom de cette marque est d'ailleurs resté dans le langage modélistique, car on désigne parfois les petits amortisseurs à bain d'huile que l'on trouve fréquemment sur les productions américaines par le terme "type Delta".

On ne peut s'empêcher de remarquer la similitude de certaines pièces avec les châssis Ayk de la même catégorie et de la même époque. Les articles sur ce site consacrés à la Ayk RX3000 Basic et à la EXL480K montrent des autos de génération antérieure. En naviguant sur divers sites (principalement sur RC Car Museum), cette auto doit se situer entre la Super Phaser (1982) et la P12 Spyder (1987). La P12 Spyder présentée sur ce site est équipé d'un train optionnel et présente quelques petites différences encore.

Sur le site TamiyaClub, on peut y voit un Super Spyder ici plus évoluée que la Spyder P12. Sur cette page on peut y voir deux Super Phaser (datant de 1982) dont une équipée du train avant optionnel (disponible semble-t'il à partir de 1985).

Un des sites de référence pour le Vintage en piste 1/12° électrique est japonais, en l'occurrence Delta-Mania. L'auto présentée en photos ci-contre est probablement une P12 Spyder avec quelques modifications personnelles, datant d'avant 1987. Sur cette page, on peut d'ailleurs en voir une en cours de restauration.

Peu d'information disponible malheureusement sur la toile concernant l'historique de cette marque; l'auteur de cet article est donc preneur de toute information complémentaire. Cette marque semble pourtant bénéficier d'une excellente aura, car ces autos avaient la réputation d'être vraiment des châssis d'ingénieur, sans compromis, et conjuguant performance, solidité et fiabilité. L'intérêt des collectionneurs semblent plus se porter sur les réalisations en piste 1/8° thermique de la marque, absolument passionnantes il est vrai.

Retour à l'objet de cette restauration. Elle consistera essentiellement en un démontage complet de l'auto, et en un bon nettoyage. Le différentiel et les amortisseurs feront l'objet d'un travail plus poussé, tandis que le châssis lui nécessitera lui un plus gros chantier. En effet, son dessous est assez usé et le dessus montre des traces de colle (probablement époxy) au niveau des slots d'accus.

Les pneus aussi sont bien fatigués, mais on pourra sans doute les sauver sans en remettre de neufs.

Le but n'est pas tant d'en faire un runner, mais de le restaurer de telle sorte que cette auto soit potentiellement susceptible de rouler.

Première étape, le train arrière.

Le train arrière est finalement assez contemporain dans sa géométrie. Il est suspendu par trois amortisseurs, un axial et deux latéraux, et comporte un Té en époxy situé dans le plan du châssis. Par contre, plusieurs points de conception sont originaux en comparaison des productions actuelles.

L'axe du différentiel est en carbone d'un diamètre identique aux voitures actuelles, avec un embout fileté côté différentiel mais le palier fixe de ce dernier et le palier de la roue gauche sont immobilisés par une goupille. Solution sans doute logique à l'époque, mais impensable à l'heure actuelle à cause de la montée en puissance des motorisations. Cela casserait bien trop facilement.

Point intéressant, les roulements du pod sont de bien plus gros diamètre extérieur que ceux utilisés actuellement (qui souffrent bien avec les motorisations actuelles). Les roulements feront un petit séjour dans du spray moteur (avec un détour préalable dans de la WD40 s'ils sont grippés), seront ensuite séchés et rehuilés avec un produit adapté.

L'axe du différentiel était fendu du côté du taraudage et la tige filetée ne tenait plus bien en place. L'axe (et particulièrement l'intérieur du taraudage) a été dégraissée à l'alcool éthylique (pas d'acétone ou autre spray moteur qui risquerait d'être incompatible avec le liant du composite). La tige filetée (qui est en fait une vis sans tête six pans creux) a été dérouillée avec du dégrippant style WD40 puis dégraissée avec du spray moteur. La vis a été vissée dans le taraudage, et l'ensemble a été immobilisé avec un liseré de colle cyano très fluide. Petite astuce pour obtenir un colle cyano très fluide: la stocker dans le réfrigérateur pendant plusieurs heures à environ 5°C. On laissera l'ensemble sécher en position verticale (pour que la cyano imprègne bien le carbone dans le sens des fibres) pendant 24h, temps nécessaire pour que cette colle atteigne 100% de sa résistance mécanique.

Comme le diamètre de l'axe aura légèrement gonflé avec cette opération du côté de l'embout fileté, on fera tourner ce côté dans un morceau de papier de verre fin de 600 environ en vérifiant régulièrement la rondité et le bon passage de la bague intérieur d'un roulement.

Malgré son apparence compacte, le différentiel est à pignon, et malgré tout assez léger. A réception, il était assez dur. La conception n'est cependant pas en cause, ni le montage du précédent propriétaire. Cela est du au vieillissement du lubrifiant utilisé à l'époque, qui a figé et carrément durci à certains endroits.

Les quatre satellites et la couronne ont été nettoyés avec une brosse à dents (usagée bien sûr ;) et du liquide vaisselle puis fini avec de l'alcool éthylique (pour éviter de détériorer leur plastique). Les petits axes métalliques des satellites ont été dégraissés avec du spray moteur.

Cependant, malgré ce nettoyage, les satellites ne tournaient pas librement sur leur axe. Ils ont donc été légèrement réalésés avec une mèche de 2mm.

Là, ils tournaient librement sur leur axe, mais installés dans la couronne, bridaient toujours. Leur épaisseur a donc été réduite d'environ 3/10° de mm en les passant sur une toile de verre fine.

Pour parfaire le tout, certaines bagues en plastique ont été remplacé par des roulement, pour "maintenir" l'axe en carbone.

Une fois ces opérations effectuées, le montage est bien plus libre.

On peut voir un éclaté de ce différentiel sur le site japonais Altezza 2000 à cette page : http://homepage2.nifty.com/altezza-2000/rc/delta/SUPER%20PHASER%20IFS%20MANUAL.pdf.

Etonnante pièce que le pod arrière, monobloc.

Le Té en époxy noir est intact, mais souffre de quelques rayures du côté exposé.

Il supporte l'axe, les ancrages des amortisseurs latéraux et le support de l'amortisseur central, sans compter le Té.

L'aluminium du pod monobloc a un peu terni avec le temps, et comme il est relativement mou (pas d'anodisation, mis à part l'oxydation naturelle), il est un peu marqué.

Un premier passage au spray moteur (ou au nettoyant frein - de marque connue si possible pour éviter les surprises) pour un premier décrassage. Les impacts résurgents seront passés au papier de verre très fin (800 min) pour les aplanir.

Après une première tentative de polissage manuel (coton avec polish d'origine Dremel), force est de constater qu'à ce rythme, il va en falloir des heures pour arriver à un résultat satisfaisant... On cèdera donc à la facilité en utilisant les embouts adaptés sur la mini-perceusel. Cela reste néanmoins assez fin et précis pour obtenir quelque chose de correct à l'oeil.

Un dernier nettoyage au spray moteur pour enlever les résidus du polissage et un coup de WD40 pour laisser un léger film gras et ainsi protéger un peu de l'oxydation (et donc du ternissement de l'aluminium poli) vont parfaire la finition de cette pièce.

Et voilà le résultat!

Certains accrocs profonds sont encore visibles, mais rien de dramatique!

Les deux rotules du Té diffèrent du standard Associated. La chape en plastique n'est pas composé de deux demi-coquilles, mais est monobloc. La boule de la rotule est de fort diamètre et en laiton et l'ensemble est assez lourd. Comme elles sont un peu bridées, on sortira la boule de rotule de sa chape avec un extracteur à roulement (pas aisé du tout comme opération) et le tout sera nettoyé à l'alcool éthylique. Avant remontage, on appliquera sur les surfaces en frottement du graphite (en fait, de la poudre de mine de crayon tout simplement - un lubrifiant sec efficace et économique!) pour gagner un peu en douceur de fonctionnement.

Les amortisseurs sont justes un peu sales, mais offrent une douceur de fonctionnement étonnante malgré l'âge de l'huile. On les démontera néanmoins, ne serait-ce que par curiosité. Les chapes en plastique sont par contre bien usées et jaunies, elles seront donc remplacées par des Team Associated récentes, qui leur ressemblent comme deux gouttes d'eau.

Leur conception est simple et astucieuse. Ils ressemblent un peu à ceux que l'on trouve sur certaines productions américaines en 1/12° piste, mais avec quelques raffinements en plus. En premier lieu, on remarquera le ressort interne (que l'on peut mettre en option sur les productions actuelles). Intéressant aussi bien pour les latéraux que pour le central.

On remarquera également le petit joint torique rouge qui fait office de piston et la coupelle de ressort d'amortisseur dont l'usinage inclut la boule de la chape.

Le support d'amortisseur central côté pod illustre comment faire une pièce à la fonctionnalité inédite avec des pièces déjà existantes et peu d'investissement (Delta semble avoir toujours été une petite société).

Un carré dans une matière qui ressemble à de l'acrylate avec un perçage et un taraudage, une chape style Associated, une vis sans tête et le tour est joué. En plus le résultat est élégant.

La chape sera néanmoins remplacée par une neuve (qui devra être néanmoins retaillée).

Les supports arrière de carrosserie en aluminium sont ternies par le temps et marqués par les clips de carrosserie et des impacts.

Pour leur redonner un coup de jeune, on les fera simplement tourner longuement dans un bout de papier de verre grain 320 (puis de 600 pour la finition) pliée en deux.

Les supports de carrosserie avant sont également en aluminium. Ils subiront donc le même traitement que leurs homologues arrière.

Les photos ci-contre illustrent l'état initial et le résultat final après polissage.

Le train avant est dans les standards de l'époque. Ce type de train avant se retrouvera encore pendant de nombreuses années en 1/12° (Delta, Ishihara, TRC, Kyosho, etc.), jusqu'à l'apogée du Pro10 (TRC, PB Sizzler, MRC Pro-Racing, etc). On peut encore voir des trains avant de ce type en catégorie Dragster et parfois en Oval.

La suspension se fait par un petit ressort dans l'axe de la fusée de direction. Son mouvement pouvait être plus ou moins freiné par de la graisse (de différentes viscosités) disposée sur cet axe.

En photo ci-contre, les axes de fusée de direction, cannelés à une extrémité et filetés à l'autre. La partie coulissante sera passée au polish. Pour ce faire, les axes seront montés sur le mandrin d'une perceuse et tourneront dans un tissu imbibé de polish (voir article sur la préparation de la CEFX C12) sur ce même site.

Les fusées de direction diffèrent un peu de celles d'Associated. En effet, elles possèdent un excentrique destiné à guider le petit ressort de suspension. Le reste du dessin semble proche des productions plus contemporaines, si l'on excepte ce que l'on imagine être de grosse bavure de moulage.

Lors des opérations d'ébavurage, de tranchage ou de grattage, il ne faut pas hésiter à essayer différentes formes de lames pour scalpel. Sur les fusées de directions par exemple, on tranchera les bavures et on initiera un chanfrein sur les parties anguleuses avec la fine et on grattera les restes de bavures et arrondira les chanfreins avec la plus grosse.

Cependant après polissage des axes, les fusées de direction, une fois montées, ne tournent toujours pas librement. De la graisse a du sécher dans le trou de l'axe et bride l'ensemble.

Une des solutions est de le nettoyer avec un coton-tige imbibé d'alcool (de l'isopropylique dans ce cas, car l'éthylique n'avait pas d'action sur cette graisse séchée). On évitera également dans ce cas l'acétone, susceptible de détériorer gravement le plastique (comme le spray moteur d'ailleurs).

L'intérieur était en effet fortement encrassé.

Après plusieurs passages, tout rentre dans l'ordre. Cela coulisse et tourne sans point dur.

La pièce maîtresse de ce train avant, la longue barre en aluminium, sera simplement passée au polish.

Voici le résultat après quelques minutes de travail.

Il en sera de même pour les paliers de ce train avant. A remarquer que ces deux paliers ne sont pas identiques. Tous deux sont fixés au châssis par une seule vis, mais le premier est fendu pour permettre de serrer la barre en aluminium (et ainsi permettre d'ajuster le carrossage) et le second bénéficie d'un pion de centrage.

Cette petite bague en plastique s'insère dans la barre en aluminium et sert à marquer son centrage. Avec le temps, ce qui semble être du polyamide avait jauni superficiellement. En grattant sa surface délicatement avec la lame d'un scalpel, cette pièce retrouve quasiment sa blancheur initiale.

Sur cette petite pièce se termine la première partie de la restauration de ce petit morceau d'histoire de la piste 1/12° électrique. Il reste le plus grand morceau, le châssis en fibre, qui nécessitera nettement plus de travail. On essaiera également de redonner un aspect neuf aux pneus.

La suite au prochain numéro!

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